“Les sociétés à succès renouvellent leurs actifs web (site, boutique e-commerce, blog…) tous les 3 à 5 ans et rafraîchissent leur identité tous les 5 à 10 ans.”
Lee W. Frederiksen, Ph.D., Hinge Marketing
Ces investissements sont cohérents à condition de prendre en compte la durée pendant laquelle ils impactent le ciblage et engagement de leur cible. Mais comment refléter cette réalité dans la comptabilité ?
Valérie Ammirati, Expert Comptable chez Skynet Expertise et Conseil, nous donne les clefs.
Trésorerie vs Bilan
Bien comptabiliser ses investissements branding ou web permet d’optimiser la “santé” du bilan.
Plus on améliore la valeur de l’actif, plus on matérialise la valorisation de l’entreprise sur la base du travail réalisé, ce qui améliore la perception d’un investisseur dans le cadre d’une levée de fonds ou encore la valorisation des redevances pour une franchise.
Comptabiliser les Travaux de Branding, Logo ou Site Web
Comptabiliser Logo, création graphique ou site web comme une Charge ?
Les dépenses correspondant au branding sont considérées comme des charges déductibles l’année de leur réalisation. Ce mode de comptabilisation peut être intéressant financièrement : les charges sont déductibles du résultat imposable en une fois, ce qui peut booster la trésorerie de l’entreprise puisqu’on décaisse moins d’impôt sur les sociétés
En revanche, cela minimise la valeur de l’actif de l’entreprise et donc la valeur de l’investissement en branding. Cela peut pénaliser le développement d’une franchise, une levée de fond ou une revente ultérieure.
Comptabiliser Logo ou site web comme Investissement Incorporel (immobilisation) ?
Suivant l’importance des dépenses, il est possible de les comptabiliser en tant qu’investissement, selon les critères suivants :
“Les immobilisations incorporelles doivent être identifiables et elles doivent générer des avantages économiques futurs. Elles doivent en outre être soumises au contrôle de l’entité concernée.”
Les dépenses de création de logo, de réécriture de la charte graphique, ou de création de site web sont donc considérées comme des investissements incorporels qui vont venir augmenter la valeur de l’entreprise.
Il faut alors inscrire les dépenses correspondantes dans un compte d’immobilisation incorporelle tel que le compte 20 205 « Concessions et droits similaires, brevets, licences, marques, logiciels », ou bien 20 122 « Frais de publicité », dans le cadre de frais exceptionnels (frais d’établissement) à la création d’une entreprise.
L’Amortissement d’un Logo ou site internet
L’amortissement permet d’étaler la valeur de l’actif sur une durée cohérente avec l’utilisation de ces travaux (3 à 10 ans). Cela est possible si vous pouvez donner une durée de vie à la dépense.
Les normes comptables proposent une durée de vie classique de 5 ans, mais l’entreprise peut choisir une durée différente en justifiant ce choix. Aujourd’hui, tout le monde a conscience que pour se développer il est important de faire évoluer l’image de marque des entreprises, et ces chantiers sont renouvelés tous les 10-15 ans.
L’entreprise peut donc opter pour un amortissement sur 10 ans voire 15 ans, en fonction de la durée de vie qu’elle va attribuer à cet investissement.
Durant cette période les “rafraîchissements” ou lifting de logo et charte graphique sont considérés comme un “entretien de l’actif” et sont comptabilisés comme charge et non comme investissement.
Enfin :
“les frais annuels de publicité et de marketing récurrents exposés pour soutenir et renforcer les immobilisations incorporelles à durée de vie indéterminée (p. ex. une marque) sont toujours comptabilisés à charge de l’exercice auquel ils se rapportent et ne peuvent par conséquent pas être portés à l’actif.”
La Valeur d’une Marque et son Logo : la notion de plus-value latente
Bien sûr, la Marque doit voir sa valeur augmenter au fil des investissements en publicité et communication. Cependant cette augmentation de la valeur du capital incorporel n’est pas visible en comptabilité ; les normes le spécifient :
“Une immobilisation incorporelle doit être évaluée initialement à son coût historique.”
La différence entre ce coût et la valeur réelle se nomme “plus-value latente”. D’un point de vue comptable, cette plus-value ne peut pas se présumer : un bilan doit donner une image de l’entreprise la plus objective possible.
Pour étayer un projet de franchising, une levée de fond ou une cession de l’entreprise, il est possible, hors bilan, de fournir des évaluations ou valeurs de cette plus-value latente à dire d’expert.
Comptabiliser une Acquisition de Marque
Comme pour souligner les limites des règles (floues) exposées ci-dessus…
Dans le cas de l’acquisition isolée d’une marque, l’inscription à l’actif est… obligatoire !
De même (mais pas obligatoire !?) à l’occasion d’une fusion ou d’un apport partiel d’actif comprenant une marque.
Quelques exemples trouvés dans les années 1990 :
- SEB a amorti sur 40 ans le coût d’acquisition de la marque Rowenta (valeur de ≈38 millions €) (basé sur les règles américaines – FASB)
- Moulinex a comptabilisé la marque Krups dans son bilan (valeur de ≈31 millions €) mais ne l’a pas amorti depuis son acquisition (basé sur l’avis du Conseil national de la comptabilité en France)
Logo, Site Web, Charte Graphique… Une Comptabilisation Flexible
Charge ou investissement, amortissement sur 5 à 15 ans… La comptabilisation des investissements en marque, logo, identité ou site web est assez flexible et dépendra de votre modèle économique, de vos objectifs stratégiques et de la durabilité de votre projet.
Video : La valeur d’une marque
Sources
Dans notre série Compta, voici un article sur comment comptabiliser une levée de fonds